Comment Jennifer Caubet s’empare-t-elle de la technique traditionnelle de la lithographie, elle qui fonde sa pratique plastique sur la mise en espace ? L’outil lithographique devient pour la plasticienne l’instigateur d’une recherche et d’une méthode de fabrication de l’image. Au-delà de la simple découverte du médium, pour Jennifer Caubet, ingénieure de l’espace, rigueur et précision s’allieront à un outil du XIXe siècle. Au sein des ateliers URDLA, elle envisage la rencontre entre des installations qui relèvent de la technologie avec des lithographies, c’est-à-dire l’impression de dessins au préalable réalisés sur une pierre calcaire. Il s’agit aussi de la rencontre des lignes faites sur le papier et des ligne qui se dessinent dans l’espace.
Dans l’une des séries de lithographies elle expérimente les jeux d’empreintes et de transferts. Blettes et salades passées sous presse deviennent empreintes sur la pierre et fourniront l’image, le dessin. Cette confrontation induit un changement radical de repères en transformant des objets en volume en une représentation plane, particulièrement sur la surface du papier. Cependant, il ne s’agit pas d’évoquer une simple trace. La lithographie ne se résume pas à un simple outil, mais devient pour la plasticienne un espace analogique de confrontation, à l’image de ses Jardins des Vertus, qui mettent en lumière de manière explicite « une révolte » , celle du vivant aux portes de l’effondrement.
Jennifer Caubet, Les Jardins des Vertus 6, 2023, lithographie, 75,5 x 55,5 cm, 20 ex./ vélin de Rives, URDLA éditeur
C’est précisément sur cet axe que réside la pratique de Jennifer Caubet. Un espace qui est tout aussi faille qu’interstice de potentialité et d’altérité. L’espace se joue dans le dessin sur le papier et dans le volume des salles d’expositions : en plus de ces grandes images imprimées, une série de volumes aux tailles et formes variées, dont la combinaison de matériaux brouille les frontières. Ces objets sophistiqués peuvent-ils être autant des instruments de mesure, des habitations que des armes ? Ils sont avant tout de ceux qui délimitent, attaquent ou défendent des zones. Ou peut-être leur dessein ouvre-t-il à de nouveaux champs ? En d’autres termes, ce sont des objets qui exercent des forces, nommées soutènement et soulèvement, qui, malgré leur apparente opposition, permettent à Jennifer Caubet de tisser des liens dans une démarche à la fois fictive et politique. Depuis 2009 avec le déploiement de son installation E.A.T (Espace d’Autonomie Temporaire), l’artiste poursuit sa lecture d’Hakim Bey qui selon elle « s’est attaché à définir des espaces alternatifs, qui puissent naître, se soulever et disparaître ». En résulte dans son œuvre, la mise en mouvement de « zones hors-temps » sans volonté d’exister à part entière.
URDLA
Samedi 7 octobre de 14 heures à 18 heures
Commentaires
samedi 21 octobre
de 15 h à 16 h
(5.- € par personne, sur réservation)
entrée libre
du mardi au vendredi de 10 h à 18 h,
le samedi de 14 h à 18 h
photographies Cécile Cayon©
Les éditions et l’exposition de Jennifer Caubet ont reçu le soutien de La Passerelle, fonds de dotation.
