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« Souvenir, il y a venir » de Frédéric Khodja,
Blandine Devers

[…]
Que ne suis-je une pierre – me dis-je –
que l’eau me polisse,
que je verdisse, jaunisse
que l’on m’expose dans une pièce
telle l’épreuve ou l’œuvre d’un sculpteur…,
une matière d’où l’utile
surgit de l’inutile.
Que ne suis-je une pierre
pour être nostalgique de quelque chose !
Mahmoud Darwich, La Trace du papillon, Actes Sud

URDLA édite cet automne une nouvelle lithographie de Frédéric Khodja, treizième estampe de l’artiste au catalogue. Elle tire son origine d’un dessin au crayon noir réalisé en novembre 2020, L’arbre chinois à la poutre kabyle, devenu quelques mois plus tard dessin d’appui au geste lithographique. Il s’agit moins d’une estampe de reproduction que d’interprétation. Un titre, nouveau, propre à l’image imprimée, Souvenir, il y a venir, indique mouvement et processus. Qui, s’ils sont graphiques, font aussi œuvre de mémoire.

La composition est scénographique. Un arbre, nu, auquel est suspendue une poutre. Sol sur lequel se dessine une ombre impossible – est-ce une ombre ? Murs, trouée chargée de lumière – absence manifeste ou manifestation en creux, révélant « la présence verticale et cet équilibre impensable. » Enfin, un ensemble de traits vibrionnant autour de la poutre, tels un faisceau de signes. Puissance théâtrale, possible activation, énigme – un rébus comme les songes en soumettent. Sont sensibles dans le même temps effacement et évanescence, quelque chose qui oscille, s’assume fragile. Souvenir, il y a venir est pour Frédéric Khodja un geste de conclusion d’une série autour du deuil de son père, disparu en 2018.

L’arbre fait paysage. « Shanshui. Ce sont les chinois qui ont inventé le mot. » Il induit la question des racines, invisibles ici. Il est aussi possible architectural comme en témoigne ce pendant manufacturé, déraciné : la poutre. Frédéric Khodja a en tête les relevés ethnographiques de charpentes kabyles, cette façon particulière de construire les maisons à laquelle les femmes sont pleinement associées – elles prennent part à l’élaboration des plans – avant de parachever les édifices, se chargeant de leur décoration intérieure. « Ce sont les seules personnes qui dessinent. Elles créent notamment des poteries, dessinent dessus et assurent une transmission orale des motifs. » Dans ce récit s’enracinent l’image ainsi que l’histoire intime : « la pierre lithographique qui ferait remonter à la surface des gestes de mémoire ».

« Le souvenir apparaît à travers, tel un suc, ce jus qu’en cuisine l’on obtient en pressant les ingrédients dans un chinois. » Qui réalise un multiple à partir de la pierre sait que la trace qu’il applique à la surface la pénètre : le gras du dessin, le grain du calcaire et sa porosité le permettent. Les pierres de URDLA sont centenaires. Elles ont accueilli mille et un gestes, ont été matrices de centaines d’intensions graphiques. Le dessin, avant de passer sous presse, disparaît à l’œil : le lithographe enlève le noir de fumée à l’aide d’essence de térébenthine. Instant vertigineux jusqu’à ce que le motif réapparaisse avec l’encre lithographique, qui se déposera sur le papier. Il aura fallu un temps certain de réglage de la presse pour faire monter l’image. Le nécessaire va-et-vient de la pierre, d’un côté et de l’autre du cylindre de pression, pour qu’elle soit mouillée puis encrée, serait alors comme des oscillations mnésiques. Plus tard, il faudra grainer la pierre, la poncer avec du sable et de l’eau à l’aide d’une seconde, pour qu’elle redevienne possible matrice.

« Tout ne fait pas souvenir dans la mémoire. » Et Frédéric Khodja d’ajouter « il ne s’agit pas seulement de traiter du souvenir mais de traiter de ce qui anime, de ce qui met en mouvement. » L’estampe, une image par définition multiple. Multiplicité du motif décliné par l’artiste en 2020 à même le papier, au printemps 2021 dans son carnet puis sur la pierre. Comme s’égrainent au fil de récits essentiels les réminiscences. Souvenir, il y a venir. Au monde. Accueillir le jour d’après, ceux qui suivront, charriant un ce qui fut de plus en plus ample, ce qui en nous vibrionne et fait éternité.

Blandine Devers
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